24 octobre 2016

[R.P. Antoine de Fleurance, OFM] Sermon au Pèlerinage de Lourdes

SOURCE - R.P. Antoine de Fleurance, OFM, Père Gardien des capucins de Morgon - 24 octobre 2016

Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, ainsi-soit-il.
Messieurs les abbés, Bien chers frères, Bien chers soeurs, Bien chers fidèles,
  
Nous sommes au dernier jour de notre pèlerinage, mais les fruits que nous devons emporter se manifesteront après ce pèlerinage. Il nous faut donc continuer dans cet élan marial que nous venons chercher à Lourdes. La Sainte Vierge, nous le savons, dans ses grandes prérogatives, est aussi la Reine des anges. Et nous fêtons en ce jour un grand archange qui s'appelle saint Raphaël. La Très Sainte Vierge Marie partage avec les anges ce merveilleux privilège qu'elle fait de ne pas avoir connu le péché, merveille aux yeux de Dieu, merveille aussi pour nous, mais aussi assurance et secours que nous pouvons recevoir de ceux qui n'ont pas commis le péché. Et si nous considérons les réalités de ce grand archange, ses missions sur la terre, il a un rôle similaire, semblable à celui que nous venons chercher à Lourdes auprès de l'Immaculée Conception.
  
L'archange Raphaël, patron des médecins, a opéré sur la terre de merveilleuses guérisons. Et à Lourdes aussi nous venons chercher notre guérison. Et si les guérisons corporelles n'ont pas forcément lieu, nous venons surtout pour être guéris spirituellement. Et c'est ce sur quoi je voudrais m'arrêter un peu ce matin, ces guérisons spirituelles, ces guérisons surnaturelles, ces guérisons de nos âmes, des âmes qui sont sur toute la terre et qui sont si importantes, dont dépendent notre éternité, dont dépendent leur éternité. Ce grand archange, comme vous le savez à travers l'histoire de Tobie, cette belle histoire, une des plus belles histoires de l'Ancien Testament - si vous ne l'avez pas lue, je vous encourage à la lire, pour voir, pour constater l'intervention divine à travers les anges et les archanges - vous le savez donc, saint Raphaël, pour opérer de merveilleuses guérisons, s'est servi du fiel, du foie et du coeur d'un poisson.
  
Et je voudrais faire, à travers ces trois organes, ces trois éléments, une petite transposition spirituelle.
  
Quand nous regardons cette réalité du fiel, nous pouvons le comparer à la pénitence qui nous est demandée, et tout particulièrement par la Sainte Vierge Marie à Lourdes. La pénitence a un côté amer, il faut bien le reconnaître ; et sainte Bernadette, dans l'apparition où Notre-Dame, où l'Immaculée Conception lui a demandé d'aller boire à la fontaine, et d'aller se laver, a commencé par partir au Gave. Mais la Sainte Vierge l'a rappellée en lui disant que ce n'était pas là. Et elle lui a fait signe que c'était au fond de la grotte, et là il n'y avait qu'une eau boueuse. Sainte Bernadette s'y est reprise à trois fois pour boire de cette eau répugnante. Eh bien, c'était une sorte de fiel. Mais voilà un exemple de cette eau apparente, - qui s'est un peu produit comme Jésus à Cana, qui a changé l'eau en vin - cette eau répugnante apparemment est devenue source de merveilles.
  
Eh bien, il en sera pareil de notre pénitence. Si nous sommes généreux pour faire des sacrifices, ces sacrifices opéreront des merveilles. Quand nous revenons au livre de Tobie, nous voyons que ce fiel du poisson a opéré comme miracle le retour à la vue, le retour à la lumière de Tobie. Et nous aussi, si nous voulons bénéficier des lumières de Dieu, si nous voulons en être animés, si nous voulons connaître qui est notre Dieu plus profondément, la pénitence est un moyen sûr, le sacrifice nous obtiendra ces lumières qui nous sont tant nécessaires dans cette confusion que nous connaissons de partout aujourd'hui. Et Tobie s'exclame qu'il voie la lumière à nouveau, et il en est tout heureux. Et l'Immaculée Conception qui n'a pas eu besoin de faire de pénitences, mais la Sainte Vierge sait bien renoncer durant sa vie terrestre ; elle est celle que nous disons être "revêtue du soleil, la lune sous ses pieds, et couronnée d'étoiles". La Sainte Vierge est toute lumineuse de Dieu, et plus nous saurons faire des sacrifices, plus elle nous fera partager cette lumière toute divine dont elle est débordante, dont elle est remplie, plénitude de grâce que nous rappellons dans chaque "Je vous salue, Marie". Voilà un petit peu de cet aspect de ce premier moyen dont saint Raphaël s'est servi pour guérir Tobie.
  
Mais il s'est servi aussi du foie de ce poisson. Et ce foie - je ne veux pas faire l'éloge des biens culinaires de la région où nous nous trouvons actuellement, mais le foie de certains animaux peut être transformé en mets délicieux, vous le savez, et peut-être le temps de Noël vous permet de goûter un peu à ces mets, voilà, même s'il faut faire pénitence, il est permis aussi de se réjouir sur cette terre - et donc, ce mets délicieux qui nous est proposé pour nous guérir, et que nous honorons tout particulièrement à Lourdes, ce mets spirituel, ce mets surnaturel, c'est la Sainte Eucharistie. Nous venons à Loudes pour honorer Jésus dans le Saint-Sacrement, en assistant à la Sainte Messe, en faisant les processions en l'honneur du Saint-Sacrement, en passant des nuits d'adoration devant le Saint-Sacrement, et même combien de malades qui ont été guéris l'ont été lors de la bénédiction personnelle du Saint-Sacrement. Non, c'est un moyen merveilleux de guérison cette Sainte Hostie, cette nourriture toute céleste, ce Pain des anges. Nous pouvons être guéris à travers la Sainte Eucharistie. Et spécialement, nous en avons besoin en ce monde qui bien douloureusement, bien péniblement, est grandement, abondamment perverti, pour guérir tout ce qui est impureté, voilà, qui inonde notre propre monde.
  
La Sainte Eucharistie est ce remède efficace, la blanche hostie toute pure, ce Pain des anges est à même de nous guérir dans ce domaine. N'hésitons pas à invoquer Notre-Seigneur dans la sainte hostie, en lui disant: "O Jésus, ô Jésus-Eucharistie, source, source de virginité, source de pureté, guérissez nos âmes, guérissez-nous de ces inclinations, de ces péchés d'impureté qui malheureusement peuvent nous conduire à la perdition." Voilà ce deuxième remède qui nous est proposé, et sainte Bernadette, quand elle considérait la Sainte Eucharistie - elle avait été d'un bonheur indicible lors de sa première communion - elle disait que ce soit les apparitions, ou que ce soit la Sainte Eucharistie, c'était tout du ciel, c'était tout du ciel, ce n'était que bonheur du ciel de recevoir Jésus-Hostie ou de voir, eh bien, la Très Sainte Vierge Marie.
  
Et le troisième organe dont saint Raphaël s'est servi pour guérir, c'est le coeur. Et bien entendu, ce coeur, c'est aussi en Notre-Seigneur-Jésus-Christ, son Coeur, son Sacré-Coeur, qui est source de la Charité. Une charité forte, une charité solide, qu'il nous faut pratiquer d'abord envers Dieu - et toutes les prières que nous faisons montrent qu'il y a un grand lien entre la vertu de religion et la vertu de charité - et plus on aime Dieu, plus on veut le prier, et plus on le prie, et plus on lui prouve notre amour, notre charité. Et dans ces prières intenses, spécialement la récitation du chapelet, le chemin de Croix sont là pour que nous prouvions cette charité au Bon Dieu, pour que nous grandissions dans cette charité ; mais aussi il y a la charité envers le prochain. Et là nous voyons ce soin des malades, cette charité fraternelle les uns envers les autres se déploie dans cette belle cité de Lourdes, voilà, où l'Immaculée Conception nous fait toucher davantage du doigt ces dispositions de coeur, coeur tout à l'exemple de celui de son Divin Fils, coeur tout rempli de charité.
  
Et sainte Bernadette, en donnant sa vie à Dieu - il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie aux autres, et quand on donne sa vie au Bon Dieu, c'est la preuve la plus parfaite de notre amour pour lui - mais sainte Bernadette dans son rôle d'infirmière, à Nevers, n'a pas cessé de prouver sa charité envers son entourage, donc pour les autres soeurs malades, et aussi sa charité l'a conduite à pratiquer une patience héroïque devant les contradictions, devant les difficultés, donc nous devons repartir avec nos coeurs animés de ces dispositons de véritable amour de Dieu, de véritable amour du prochain.
  
Et comme nous sommes dans la perspective, même nous avons quasiment commencé d'honorer Notre-Dame pour les cent ans de ses apparitions à Fatima, je voudrais faire une petite répercussion pour notre avenir sur ces trois points par rapport aux apparitions de Fatima. Et rappelons-nous que là aussi, qui c'est qui a été le précurseur de la Sainte Vierge? C'est un ange, c'est un ange, voilà. Notre ordre de saint François a connu sa naissance, le berceau de l'ordre est dans une chapelle qui est dédiée à Notre-Dame des anges, nous restons donc dans notre thème.
  
Et donc pour bien poursuivre ce pèlerinage de Lourdes, pour bien entamer cette année des cent ans des apparitions de Fatima, nous allons reporter nos trois remèdes sur trois choses que la Sainte Vierge a demandées à Fatima. Et le fiel, que nous avons évoqué, il faut que nous pensions qu’à Fatima, l'aspect de l'enfer est un point important. Et s’il nous répugne de méditer sur l'enfer, cela est pourtant très salutaire. Nous serons peut-être devant la méditation sur l'enfer comme sainte Bernadette devant la source d'eau boueuse. Mais nous devons regarder de près l'effet merveilleux que la vision de l'enfer a produit sur les enfants de Fatima. Cette vision - alors peut-être vous me direz : " Mon Père, mais c'était des enfants, donc ils ont été terrorisés" - cette vision les a profondément convertis. Croyons que l'enfer est une vérité catholique d'importance, ce n'est pas la plus essentielle, mais c'est une vérité catholique importante, à laquelle nous devons penser, pour l'éviter nous-mêmes et aussi pour prier pour que les âmes aient la crainte de l'enfer ou découvrent la crainte de l'enfer, et par là prennent le chemin du Ciel. Si la Sainte Vierge Marie, au début du XXe siècle, a mis en place ou a promu cette vision de l'enfer dans une de ses apparitions, c'est que c'était important pour notre temps, pour notre temps. Donc n'hésitons pas courageusement, généreusement, en esprit de pénitence, à méditer sur cette vérité de foi. Deuxièmement, ayons à coeur de pratiquer les cinq premiers samedis du mois, où nous sommes appellés à cette occasion à recevoir Jésus-Hostie qui veut guérir très profondément nos âmes, le plus parfaitement possible. Voilà, nous sommes appelés à communier le premier samedi du mois en dehors de la messe du dimanche, et cela est très bon, et cela est très salutaire. Et enfin, ayons à coeur de grandir dans l'amour de Dieu, spécialement par la récitation du Rosaire. Le Rosaire médité nous fait considérer toute la réalité divine et humaine de Notre-Seigneur-Jésus-Christ, de notre sainte religion, et par là nous fait forcément croître dans l'amour de Dieu.
  
Et pour terminer, ayons à coeur, par esprit de véritable charité, de promouvoir les oeuvres d'apostolat marial, spécialement la Milice de l'Immaculée et la Légion de Marie.
  
Voilà, devenons des apôtres de Notre-Dame durant cette année mariale, pour continuer après, et nous en recevrons de grands bienfaits, et nous comprendrons la grandeur de l'Immaculée Conception, et aussi combien elle se montrera notre Mère si nous sommes de véritables enfants envers elle.
  
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, ainsi-soit-il.