31 août 1976

[Jean-Claude Escaffit et Robert Ackermann - la Croix] Paul VI : «Une attitude de défi, un cas regrettable»

SOURCE - La Croix - 31 aout 1976

Par Jean-Claude Escaffit et Robert Ackermann, envoyés spéciaux à Lille

Paul VI a invité dimanche les sept mille Italiens et étrangers, réunis à Castel Gandolfo pour l’Angelus, ainsi que tous ceux qui l’écoutaient à la radio, à unir leurs prières à la sienne. Il
faut prier, a-t-il dit, « pour la concorde, l’unité et la paix à l’intérieur de l’Église », afin qu’« elle soit toujours fidèle au désir suprême du Christ qui l’a voulue à la fois une et catholique, comme une communion universelle de fidèles vivant dans la même foi et dans la même charité ».

Le Pape a attribué à ce moment de prière, au moment où Mgr Lefebvre célébrait la messe à Lille, une signification précise : « Ce moment, a-t-il déclaré, doit confirmer en nos consciences l’adhésion ferme et filiale à notre Église troublée et déchirée à présent par différents cas de contestation qui tendent à soustraire leurs promoteurs et leurs adeptes à la vraie solidarité ecclésiale. Il s’agit d’une contestation qui tend aussi à les pousser sur les voies fuyantes d’opinions personnelles, dispersives et destructives de la famille unie, authentique et unique du Christ. »

Paul VI, sans citer le nom de Mgr Lefebvre, a poursuivi : « Un de ces cas douloureux et maintenant le plus grave – inutile de le cacher – est celui d’un de nos frères dans l’épiscopat que nous avons toujours estimé et vénéré. Malgré nos exhortations, il a commis une grave infraction à une loi de l’Église en conférant indûment ces ordinations sacrées. Il a encouru ainsi la suspension de l’exercice des facultés sacerdotales prévue par le Code de droit canonique. »

« Cependant, a dit encore le Pape, nous apprenons que ce frère, dans une attitude de défi envers ces clés mises dans nos mains par le Christ, veut s’arroger le droit célébrer des actes de culte et de ministère sans la réconciliation préalable, due et attendue, avec l’Église de Dieu. »

« Nous sommes très peinés et, certainement, vous aussi », a ajouté le Pape, s’écartant du texte officiel diffusé par la salle de presse du Vatican. « Mettons ensemble ce cas regrettable au cœur de notre prière avec un humble espoir. C’est une occasion pour nous de vous répéter, à vous, fils bons et sensibles aux amertumes qui affligent la sainte Église, combien il est nécessaire de renforcer notre véritable sens de l’Église, sans nous laisser déprimer par les exemples, aujourd’hui malheureusement fréquents, d’attitudes incorrectes à son égard. »

« Il faut que notre amour pour l’Église, a dit encore le Pape, revenant au texte officiel, augmente en suivant la ligne dans laquelle le Christ l’a aimée jusqu’à se sacrifier pour elle. C’est-à-dire, a conclu Paul VI, jusqu’à lui être fidèle, au milieu du tumulte de l’histoire, avec la conscience profonde de ce qu’elle est dans le dessein divin et avec une force d’âme généreuse et cohérente. »