1 février 2013

[Loïc Merian - La Nef] Fraternité Saint-Pie X : dernière chance?

SOURCE - Loïc Merian - La Nef - février 2013

«Le pape Benoît XVI est extrêmement désireux de surmonter les tensions qui ont existé entre l’Église et votre Fraternité » : c’est par ces mots que se termine la lettre que Mgr Augustine Di Noia, vice-président de la Commission pontificale Ecclesia Dei, a adressée à Mgr Bernard Fellay, supérieur de la Fraternité Saint-Pie X au cours de l’Avent 2012 et rendue publique le 20 janvier. À lire cette longue et émouvante lettre, on est frappé de voir à quel point le Saint-Siège a tout tenté pour réconcilier la Fraternité avec l’Église. Et ce malgré les reproches internes dans l’Église même, les attaques des médias, les revirements parfois cinglants vis-à-vis du pape dans les discours de la Fraternité. Le Saint-Siège aurait eu mille fois l’occasion de dire « nous avons tout tenté, c’est inutile » et tout le monde l’aurait compris.

Cette lettre au ton grave mais apaisé en appelle à un sursaut spirituel. « Son enjeu, écrit Mgr Di Noia, n’est autre que l’unité de l’Église. » Après avoir constaté que « les termes de notre désaccord au sujet du Concile Vatican II demeurent, en fait, inchangés », il propose avec sollicitude, charité mais fermeté sur le fond, de « développer des considérations nouvelles, de nature plus spirituelle et théologique » : « Que vous est-il donc demandé dans la situation présente ? Non pas de perdre le zèle de votre fondateur, Mgr Lefebvre. Loin de là ! Au contraire, il vous est demandé de raviver la flamme de son zèle ardent pour la formation des hommes au sacerdoce de Jésus-Christ. Le moment est sûrement venu d'abandonner la rhétorique âpre et contre-productive qui a surgi au cours des années passées. […] Le charisme authentique de la Fraternité consiste à former des prêtres pour le service du peuple de Dieu, non à se donner la mission de juger et de corriger la théologie ou la discipline d'autrui dans l'Église. […] Nous ne pouvons pas usurper la mission du Souverain Pontife en nous arrogeant le droit de corriger publiquement les autres dans l'Église. »

Mgr Di Noia ne nie aucun des points de désaccord, sur le Concile, le Magistère, mais il sait qu’ils ne seront pas surmontés d’un coup : « Ce que nous cherchons n’est pas une œuvre humaine : nous cherchons la réconciliation et la guérison par la grâce de Dieu, sous la conduite aimante du Saint-Esprit », écrit-il. Alors que l’on pensait que tout espoir d’accord était désormais écarté sous ce pontificat, voici que Benoît XVI, avec sa ténacité paisible, tend encore la main à la Fraternité : « Voici venu le moment d’une grâce extraordinaire : saisissons-le de tout notre cœur et de tout notre esprit », lit-on dans la lettre.

Celle-ci a été envoyée par Mgr Fellay à tous les prêtres de la Fraternité, ce qui est plutôt positif. Espérons que sa gravité et sa justesse de ton sauront toucher les cœurs et permettre qu’enfin la Fraternité puisse, au sein de l’Église, déployer pleinement ses charismes pour le plus grand bien des âmes.
L.M.