28 juin 2012

[Refractaire] Analyse de la déclaration doctrinale (II)

SOURCE - Réfractaire - 28 juin 2012


«L’entière Tradition de la foi catholique doit être le critère et le guide de compréhension des enseignements du Concile Vatican II, lequel à son tour éclaire certains aspects de la vie et de la doctrine de l’Église, implicitement présents en elle, non encore formulés. Les affirmations du Concile Vatican II et du Magistère Pontifical postérieur relatifs à la relation entre l’Église catholique et les confessions chrétiennes non-catholiques doivent être comprises à la lumière de la Tradition entière.»

L’extrait de la Déclaration doctrinale que Menzigen a proposé à Rome le 15 avril dernier a déjà retenu notre attention hier. En sa première proposition, il admet comme « enseignements » de l’Eglise les affirmations de Vatican II prises dans leur globalité, « enseignements » qui néanmoins réclament une « compréhension » juste, rendue possible grâce au critère de la Tradition. Autant dire que, selon ladite Déclaration, le problème n’est pas tant le Concile lui-même que certaines interprétations erronées qui en sont données. Si Benoît XVI nous avait habitués à ces arguments ressassés et à peine dignes de la méthode Coué, nous les retrouvons pour la première fois – ô combien hélas ! – dans un texte officiel de la Fraternité Saint Pie X.

La nouveauté du discours éclate plus encore dans l’affirmation suivante : A son tour, [le Concile Vatican II] éclaire certains aspects de la vie et de la doctrine de l’Eglise, implicitement présents en elle, non encore formulés. Je suppose que les fils spirituels de Mgr Lefebvre, pour autant qu’ils aient un tant soit peu de mémoire, ne peuvent qu’être consternés devant une telle formule. Car en son temps, le fondateur de leur Fraternité avait un tout autre discours lorsqu’il couchait officiellement sur le papier son jugement sur le Concile, là aussi adressé à un Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le Cardinal Ottaviani. C’était le 20 décembre 1966. La lettre serait à relire entièrement, n’en citons qu’un passage :
« Alors que le Concile se préparait à être une nuée lumineuse dans le monde d'aujourd'hui si l'on avait utilisé les textes préconciliaires dans lesquels on trouvait une profession solennelle de doctrine sûre au regard des problèmes modernes, on peut et on doit malheureusement affirmer que : d'une manière à peu près générale, lorsque le Concile a innové, il a ébranlé la certitude de vérités enseignées par le Magistère authentique de l'Eglise comme appartenant définitivement au trésor de la Tradition. »
Et Mgr Lefebvre de rentrer dans le détail :
« Qu’il s'agisse de la transmission de la juridiction des évêques, des deux sources de la Révélation, de l'inspiration scripturaire, de la nécessité de la grâce pour la justification, de la nécessité du baptême catholique, de la vie de la grâce chez les hérétiques, schismatiques et païens, des fins du mariage, de la liberté religieuse, des fins dernières, etc... Sur ces points fondamentaux, la doctrine traditionnelle était claire et enseignée unanimement dans les universités catholiques. Or, de nombreux textes du Concile sur ces vérités permettent désormais d'en douter. »
Après une telle énumération, que reste-t-il des grandes thèses conciliaires ? Quels sont ces « aspects de la vie et de la doctrine de l’Église » supposés être mis en lumière par Vatican II ?

J’ai beau m’armer de bonne volonté pour tenter de les dégoter, j’avoue ne les point trouver.

Certes la sacramentalité de l’épiscopat y a été déclarée pour la première fois. Mais même cette affirmation, qui déjà était communément admise, se trouve gravement assombrie par le Concile. Si celui-ci la mentionne, c’est afin d’avancer sa nouvelle doctrine sur la transmission de la juridiction épiscopale, contraire aux enseignements explicites de Pie XII. « Eclairage » avez-vous dit ? Ce langage n’est pas celui de Vérité. Il ne peut être celui de la Fraternité.

Supposer l’éclairage réciproque de la Tradition et de Vatican II n’est qu’une fadaise, fruit de l’aveuglement si l’on écoute une dernière fois Mgr Lefebvre en sa déclaration de 1966 : « Ce serait nier l'évidence, se fermer les yeux que de ne pas affirmer courageusement que le Concile a permis à ceux qui professent les erreurs et les tendances [auparavant] condamnées par les Papes, de croire légitimement que leurs doctrines étaient désormais approuvées. »