12 avril 2006

Diviser pour Régner - réflexions pour le mois d'avril 2006
12 avril 2006 - Mgr Richard Williamson
Il peut être utile d’aller au cinéma. Il y a quelques années je suis allé voir un film qui s’appelait «Michael Collins ». Là j’ai appris une épisode de l’histoire de mon pays que je ne connaissais pas, et qui jette une lumière intéressante sur la situation actuelle entre Rome et la Fraternité St. Pie X.

Pendant des siècles l’Irlande avait souffert sous la domination des Anglais. Au 19ème siècle un mouvement de nationalisme irlandais prit de la force jusqu’au moment où en 1916 il y eut dans la capitale de l’Irlande, Dublin, une révolte armée, que l’armée britannique écrasa. Mais lorsque les Britanniques passèrent par les armes 16 meneurs de cette révolte, le sentiment national en Irlande se retourna de façon décisive contre les Britanniques, et les Irlandais lancèrent une guerre de maquis contre l’armée d’occupation. Ils y réussirent si bien que la puissante armée de l’Empire Britannique fut effectivement réduite à l’impuissance.

A ce moment-là, en 1921, les Britanniques renoncèrent à la force du lion pour recourir à l’astuce du renard. Pour mettre fin aux hostilités, ils offrirent aux Irlandais un traité de paix parfaitement calculé pour plaire à l’une moitié des rebelles autant qu’il déplairait à l’autre, et pour appliquer une pression supplémentaire, ils profitèrent d’une classique faiblesse personnelle du chef reconnu de la résistance, Michael Collins, pour assurer que le traité serait accepté.

Et cela réussit. Lorsqu’il rapporta en Irlande le traité qu’il avait été forcé d’approuver, la résistance irlandaise se divisa en deux, en sorte qu’ils cessèrent de se battre contre les Britanniques et se mirent à se battre entre eux. Ainsi commença la guerre civile irlandaise qui dura un an et demi, et qui laissa des cicatrices aujourd’hui encore visibles.

Pour éviter cette guerre civile, les Irlandais auraient dû décider, et se mettre d’accord, sur ce qu’ étaient les vrais besoins de l’Irlande.

Alors quels sont les vrais besoins de la Fraternité St. Pie X ? Je viens de rencontrer une citation prophétique d’un prélat français du 19ème siècle, Mgr. Gaume : « A ces heures redoutables, une sorte de vertige semble tomber sur le monde. Les têtes tournent. Les mots changent de signification. Les plus fermes esprits ne raisonnent plus, les autres déraisonnent complètement. Dans le conflit incessant des opinions contradictoires, les convictions chancellent. L’incertitude du vrai engendre l’incertitude du droit. De là une foule de jugements erronés, et trop souvent d’actes éternellement regrettables. »

Ces paroles décrivent à merveille ce qui se passe autour de nous. Dans sa poursuite folle de la liberté, l’homme moderne rejette toute contrainte – s’il le pouvait, il se libérerait de la nécessité de respirer l’oxygène ! Or, c’est la grâce qui sauve et garde la nature, et alors pendant longtemps l’Eglise Catholique a tenu tête à cette folie. Mais avec Vatican II la masse des évêques du monde a accepté le principe de la liberté religieuse, et dès ce moment-là les digues qui tenaient encore se sont rompues, et la folie a inondé l’Eglise même.

En effet, le principe de la liberté religieuse libère la société civile, la société humaine, donc l’homme, de la vraie religion de Dieu. Mais si l’homme a le droit de se libérer de la vérité divine, quelle vérité moindre peut encore le lier ? Mais à quoi sert un esprit sans vérité si ce n’est pour devenir fou ? Et si l’esprit est fou, à quoi servent encore toutes les bonnes intentions du monde ?

Pendant et après Vatican II, Mgr. Lefebvre n’a pas cédé. Il a fondé la Fraternité St. Pie X pour qu’elle ne cède pas non plus. Logiquement, les eaux déchaînées se jettent contre les digues de la Fraternité de tous les côtés. Logiquement, la Fraternité n’est pas là pour ne défendre que ses propres intérêts, ni seulement la doctrine catholique entière. Elle est là pour empêcher que les têtes tournent, que les mots changent de signification, que les esprits cessent de raisonner ou déraisonnent complètement. Elle est là pour refuser la contradiction, pour renforcer les convictions justes, pour distinguer nettement entre le vrai et le faux, le bien et le mal, pour empêcher les jugements erronés et ces actes à jamais regrettables qui les suivent.

Même avec tous ses alliés, la Fraternité affronte ici une tâche évidemment surhumaine. Mais « Notre secours est dans le nom du Seigneur. »

Par quel moyen celui-ci va sauver son Eglise et le genre humain de leur fantaisie de libération, ce n’est pas à nous de voir. Par contre ce dont la Fraternité a vraiment besoin, c’est de secourir toute vérité en préservant la vérité Catholique entière, en particulier contre sa contamination par ses ennemis conciliaires. Que ceux-ci tournent autour de la Fraternité comme des papillons de nuit autour d’une flamme, c’est un bon signe. Cela prouve au moins que la bougie est encore allumée !

Mère de Dieu, Siège de la Sagesse, priez pour nous.

+ Richard Williamson