10 mai 2010

[Paix Liturgique] Au pays de Fatima aussi, un pratiquant sur deux assisterait volontiers à la messe traditionnelle dans sa paroisse. Pourtant, trois catholiques portugais sur quatre n'ont jamais entendu parler du Motu Proprio de Benoît XVI

SOURCE - lettre 229 de Paix Liturgique - 10 mai 2010

Du 11 au 14 mai, le Saint Père se rend en voyage apostolique au Portugal pour le Xème anniversaire de la béatification des pastoureaux de Fatima (Francisco et Jacinta Marto). À l'occasion de ce déplacement, Paix Liturgique a commandité à l'Institut Louis Harris un sondage sur la réception du Motu Proprio Summorum Pontificum par les catholiques portugais. Le Portugal, pays de grande tradition catholique, semble en effet être passé totalement à côté de ce texte. C'est bien simple, il n'y a qu'une seule messe traditionnelle dominicale régulière célébrée dans tout le pays (à Fatima). Et encore est-elle non paroissiale... Avec la messe de la Fraternité Saint Pie X à Lisbonne, ce sont les deux seules célébrations selon le missel de 1962 dans tout le pays.

Les résultats de cette nouvelle étude, réalisée du 29 avril au 6 mai 2010 par l’institut de sondage professionnel Harris Interactive auprès de 1433 personnes de 18 ans et plus habitant le Portugal dont 950 se considèrent comme catholiques, sont instructifs à plus d’un titre.

En résumé : les catholiques portugais découvrent la liberté de la messe traditionnelle et ils veulent en user.

Question n°1 : Assistez-vous à la messe ?
Chaque semaine : 11,7%
Une fois par mois : 7,6%
Pour les grandes fêtes : 12%
Occasionnellement (mariages…) : 68,7%

Question n°2 : Le pape Benoît XVI a rappelé en juillet 2007 que la messe pouvait être célébrée à la fois sous sa forme moderne dite « ordinaire » ou « de Paul VI » - en portugais, le prêtre faisant face aux fidèles, la communion étant reçue debout – et sous sa forme traditionnelle dite « extraordinaire » ou « de Jean XXIII » - en latin et grégorien, le prêtre tourné face à l’autel, la communion reçue à genoux. Le saviez-vous ?
Oui : 26%
Non : 74%

Question n° 3 : Considéreriez-vous comme normal ou pas normal si les 2 formes liturgiques devaient être célébrées régulièrement dans VOTRE paroisse ?
Normal : 44,7%
Pas normal : 40%
Ne se prononcent pas : 15,3%

Question n°4 : Si la messe était célébrée en latin et grégorien sous sa forme extraordinaire dans VOTRE paroisse, sans se substituer à celle dite ordinaire en portugais, y assisteriez vous ?

Réponses des seuls pratiquants réguliers (hebdomadaires et mensuels)

- 29,5% y assisteraient chaque semaine
- 24% une fois par mois
- 14,2% lors des grandes fêtes
- 23,5% occasionnellement
- 8,8% jamais


LES REFLEXIONS DE PAIX LITURGIQUE

1/ Après les sondages réalisés en France, en Italie et en Allemagne, ce nouveau sondage confirme l'excellente disposition du peuple catholique envers la forme extraordinaire du rite romain. Ici encore, comme partout (sauf en Italie, où le pourcentage était nettement plus élevé), environ un tiers des pratiquants assisteraient chaque semaine à la messe traditionnelle si elle était célébrée dans leur paroisse. Nous le répétons : cette indication partout et constamment répétée est une donnée pastorale massive, incontournable comme on dit. Seuls les évêques – non, les aveugles, pardonnez nous le lapsus – peuvent l’ignorer.

2/ Cette faveur est d’autant plus intéressante que, pour la première fois au cours de cette série d'enquêtes commanditées par Paix Liturgique, la grande majorité des catholiques interrogés n'avait jamais entendu parler du Motu Proprio Summorum Pontificum : 74%. Autrement dit, apprenant que l’assistance à la messe traditionnelle dans leurs paroisses serait possible, comme partout dans le monde, des catholiques qui en sont privés depuis 40 ans disent qu’ils aimeraient bien y assister TOUTES LES SEMAINES.
Cette ignorance des catholiques portugais est certainement due à plusieurs phénomènes :
- le peu d'intérêt des médias portugais pour les questions liturgiques,
- l'hostilité sourde de l'épiscopat mais aussi d'une bonne part du clergé portugais à la réforme de la réforme entreprise par Benoît XVI en général et à la libération de la messe " Extraordinaire " en particulier.

3/ En outre, nonobstant cette méconnaissance de la nouvelle situation liturgique permise par le geste réconciliateur du Saint Père en 2007, 44,7% des fidèles trouvent instinctivement normale la coexistence des deux formes du rite romain dans les paroisses. Il convient toutefois de signaler les plus de 40% de catholiques qui jugent anormale une telle cohabitation liturgique. C'est bien plus qu'en France, qu'en Italie ou qu'en Allemagne où les réfractaires ne représentent (voir nos enquêtes CSA 2008, Doxa 2009 et Harris 2010) au pire qu'un quart des catholiques. Certains seraient tentés d'en conclure que la liturgie nouvelle a trouvé au Portugal un consensus plus large qu'ailleurs. Sauf que le taux de pratique des Portugais est presque aussi faible que celui des Français : à peine 20% des catholiques portugais vont à la messe au moins une fois par mois. Et surtout, point capital, 74% ignoraient jusqu’à ce jour que la célébration de la messe traditionnelle était redevenue possible.

4/ D'ailleurs, à la question sur l'attitude des pratiquants face à la forme extraordinaire du rite romain, seuls moins de 9% refusent catégoriquement d'y assister. Autrement dit, plus les Portugais interrogés sont pratiquants, plus ils sont favorables à la messe en forme extraordinaire. Il est donc clair que c'est plus par ignorance que par idéologie que 40% jugent anormale la coexistence des deux formes du rite. A la limite, ils font un simple constat : celui de la quasi inexistence de la liturgie traditionnelle dans le pays. Du coup, son existence, c’est un fait, est “anormale” dans ce pays.

5/ Enfin, on aura remarqué que 53,5% des pratiquants " réguliers" (c'est-à-dire qui vont à la messe au moins une fois par mois), pratiquants par la force des choses de la forme ordinaire, se déclarent prêts à assister régulièrement à la forme extraordinaire si elle devait être célébrée dans leur paroisse, à divers degrés de fréquence (toutes les semaines, tous les mois, occasionnellement). De ce point de vue, le Portugal ignorant du Motu Proprio se place tout de même dans la fourchette haute de notre série d'enquêtes.
Ce n'est pas aussi bien que l'Italie (63%, sondage Doxa 2009), mais c'est mieux que l'Allemagne (44%, sondage Harris interactive 2010) et beaucoup mieux que la France (34%, sondage CSA 2008). Tenus à l'écart du débat liturgique et ne connaissant que la liturgie moderne depuis plus de 35 ans (dès le milieu des années 70, la messe tridentine avait à peu près disparu du pays), les Portugais sont néanmoins désireux de prier au rythme de la liturgie traditionnelle, sans aucun préjugé idéologique à son encontre. Il leur manque seulement des curés courageux pour la célébrer.

Une fois de plus, au Portugal comme partout ailleurs, la prétendue réception unanimement favorable de la réforme liturgique de Bugnini s’avère une monumentale duperie idéologique. C’est le clergé – et tout spécialement ce sont les évêques – qui maintiennent ce rideau de fumée contre la volonté du Peuple de Dieu. Contrairement au refrain de la grande majorité des théologiens postconciliaires, l’Église n’avait jamais été aussi « pyramidale » qu’aujourd’hui et les fidèles si peu écoutés.

6/ Ce sondage a coûté la somme de 5700 € TTC. Si vous souhaitez participer à son financement et nous permettre de continuer notre travail d’information, vous pouvez adresser votre don à Paix Liturgique, 1 allée du Bois Gougenot, 78290 CROISSY-SUR-SEINE en libellant votre chèque à l'ordre de Paix Liturgique ou par virement : IBAN : FR76 3000 3021 9700 0500 0158 593 - BIC : SOGEFRPP.

P.S. : dans une lettre précédente, nous nous demandions si nous serions en mesure de financer, en collaboration avec des amis écossais, un sondage sur les désirs des catholiques de ce beau pays : Un généreux donateur nous a rendu ce projet possible, nous demandons à tous nos amis de prier à ses intentions.